L’opéra-pastorale de Lorenzani, Nicandro e Fileno, sur un livret en italien de Philippe-Julien Mancini, duc de Nevers, et commandité par le duc de Vivonne, fut créé devant le Roi Louis XIV dans la Galerie des Cerfs du Château de Fontainebleau en septembre 1681. Succès indéniable auprès du roi et de sa cour, Nicandro e Fileno apporta à Lorenzani une importante renommée. L’œuvre fut écrite pour 6 chanteurs, accompagnés par un ensemble instrumental de 10 musiciens.

Pour célébrer le 150e anniversaire de la Confédération canadienne (ce projet a été retenu au Nouveau Chapitre du CAC), la proposition artistique des Boréades en co-production avec le Nouvel Opéra est une relecture intégrale de cet opéra redécouvert par le canadien Albert La France et publié en 1999 dans la collection Patrimoine Musical Français aux Éditions du Centre de Musique Baroque de Versailles.

Il n’a pas été produit en version scénique depuis sa création en 1681 et n’a jamais été enregistré sur disque (ce projet sera enregistré par les Boréades et Le Nouvel Opéra sur étiquette ATMA). Une ouverture et des intermèdes instrumentaux sont ajoutés à l’opéra. Ces ajouts seront tirées de la production musicale de contemporains de Lorenzani (Charpentier, Lully). Le manuscrit original ne contient pas de prologue et d’intermèdes musicaux. Lors de la création en 1681, l’ouvrage fut complété avec des intermèdes théâtraux, car nous savons qu’il eut lieu en collaboration avec La Comédie Française et Italienne, nous avons le nom des acteurs.

Le Duc de Nevers et sa muse, interprétés par Francis Colpron et Marie-Nathalie Lacoursière

Le Mercure galant dit bien que Lorenzani en avait « fait la musique, qui fut admirée de toute la cour, aussi bien que la Symphonie. » Lorenzani aurait-il écrit une ouverture maintenant perdue? Personne ne le sait.  Quoiqu’il en soit, il est assez difficile d’imaginer, de nos jours, une musique de scène, même sous forme de concert, sans un prologue musical.  C’est donc dans ce contexte que nous proposons l’ajout de musiques instrumentales.

Ce projet s’inscrit dans le créneau de la musique baroque. Nicandro e Fileno s’inscrit comme une œuvre en tous points remarquable tant par la pertinence de son livret qui exploite le thème des abus des hommes sur les femmes que par la beauté de sa musique audacieuse, archaïque par moment et d’une nouveauté bien souvent suffocante (pureté de la ligne toute Monteverdienne, à la flamboyance des motets français dans le style antiquo). Ce témoignage de Sébastien de Brossard, l’une des intelligences du règne du Roi Soleil, grand compositeur français de motets et de messes polyphoniques, est révélateur de l’épisode que fut la venue de Lorenzani à Paris en cette fin de siècle. Tous ces succès rencontrés par Lorenzani ne pouvaient que troubler Jean-Baptiste Lully, surintendant de la musique royale à la cour du Roi, qui en était jaloux. Lorsque les ducs de Vivonne et de Nevers présentèrent au roi l’opéra pastorale en 1681, Lully fit tout ce qui était en son pouvoir pour les en empêcher, mais en vain. A lire cette partition et les témoignages du temps, le lecteur pourrait penser que Lorenzani cultivait la provocation à dessein.

En fait, Lorenzani était né provocateur et ne savait sans doute pas être autrement, à une époque où tout était conspiration.

 

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L’Ouverture d’Amadis de Jean-Baptiste Lully remplace la Symphonie perdue de Lorenzani dans la production des Boréades et du Nouvel Opéra

 

Ce projet contribue grandement au développement de notre organisme.  Il se définit dans un premier temps par l’appel au dynamisme présent sur le territoire québécois en établissant, pratique courante depuis quelques années déjà aux Boréades, des associations structurantes avec différents partenaires du monde artistique : en l’occurrence, notre association avec le Nouvel Opéra , compagnie qui consacre ces activités de production à l’opéra des époques baroque et classique; ceci entraînant, en deuxième lieu, la mise en place de propositions artistiques nouvelles exerçant, nous en sommes convaincus, une influence notable sur le développement de notre discipline.